Solomon Rossine 15-26/07
Chapelle des 7 Dormants
Solomon Rossine est né en 1937 en Biélorussie à Gomel. En août 1941, alors qu’il n’a que quatre ans, il est contraint de fuir avec ses parents, juifs russes, les troupes nazies arrivées dans son village. La famille se réfugie en Oural. Ses grands-parents, restés sur place, sont exécutés par les nazis dans les jours qui suivent. Un trauma, augmenté de tous les massacres qui suivront et qui le poursuivront toute sa vie.
« Il fait ses études d’arts plastiques à Leningrad et Moscou. Entre 1965 et 1988, il voyage à travers l’Union soviétique, retirant de ce périple des impressions qui fondent toute sa peinture. Il participe à de nombreuses expositions, le plus souvent non officielles, à Leningrad, Tallinn, Moscou. En 1989, il fait sa première exposition en Occident et, deux ans plus tard, s’installe en France, à Lannion où il vit encore aujourd’hui.
A Lannion comme à Leningrad, Solomon Rossine mène une vie d’ermite, à l’instar des grands peintres d’icônes d’antan. Tout comme eux, il peint la vie et la mort, les hommes, leur grandeur, leurs misères. Au premier regard, on serait tenté, en découvrant ses œuvres, de penser à Chagall. Mais l’humanité de Rossine est autrement paradoxale, rapprochant l’artiste des Van Gogh – source inépuisable d’inspiration pour lui -, Bruegel, Goya.
Le paradoxe est une des clefs permettant de comprendre l’oeuvre de Solomon Rossine. C’est le paradoxe de la vie « soviétique » d’hier, de la vie « russe » d’aujourd’hui ; celui d’une existence quotidienne dure et cruelle mais au travers de laquelle apparaissent la tendresse et la compassion ; celui, enfin, du grotesque qui devient harmonieux et du beau qui devient effrayant.
Paradoxaux, les titres de ses toiles ne le sont pas moins : Joyeuses banlieues, Lecture du « Sermon sur la Montagne », au pensionnat pour aveugles « Commune de Paris »... sans oublier Vue sur kolkhose d’un satellite, titre d’un ouvrage consacré à son exposition de Caen. On songe aux œuvres littéraires d’un Alexandre Zinoviev, d’un Andreï Platonov ou – paradoxe encore – d’un Cholem-Aleichem. On songe aussi à Gogol et, dans un autre genre, à Fellini. Car ce n’est pas le moindre paradoxe de Solomon Rossine : son œuvre ne saurait être plus personnelle et plus russe, et en même temps, plus universelle.»
Anne Coldefy-Faucard